Nos revendications

photo Eric Roset

1. La crise sanitaire a mis en évidence que les femmes représentent les trois quarts des salariés actifs dans des métiers indispensables au fonctionnement de la société et de l’économie, dits aussi emplois « systémiques ».

Or, d’une manière générale, ces métiers sont moins bien rémunérés que les métiers majoritairement masculins dans les domaines techniques, dans le management ou encore dans des secteurs comme les assurances et la finance. Ce sont pourtant ces métiers qui se sont révélés indispensables au fonctionnement de la société. Pendant que tout était arrêté ou ralenti, ces personnels ont continué de travailler. Le versement d’une prime, comme cela s’est fait dans certains secteurs, est la moindre des choses pour reconnaître le travail extraordinaire fourni, mais pour le moment, dans le secteur public et subventionné, les compensations sont loin d’être suffisantes.

→ PRIME DE RISQUE. Dans l’immédiat, nous exigeons une prime pour tous les personnels du secteur de la santé, quel que soit leur métier, qui ont assuré le fonctionnement du système de santé pendant la pandémie ;

→ VALORIER LES METIERS DES SOINS. Une prime ne suffit pas. Les personnels de la santé exigent maintenant des hausses de salaires. Nous voulons valoriser les salaires des fonctions et métiers féminins et améliorer les conditions de travail ;

→ LA SANTE EST UN DROIT. Le droit fondamental à un accès aux soins doit être garanti à toutes et tous. C’est une question de droits fondamentaux, mais aussi de santé publique ;

→ RENFORCER LA SANTE PUBLIQUE. Il est temps de reconstruire un véritable service public de la santé comprenant toute la chaîne sanitaire : la production de matériel et de médicaments, la recherche scientifique, le financement des soins, y compris l’assurance maladie, les établissements de soins, hôpitaux, EMS et soins à domicile ;

→ FORMER LE PERSONNEL NECESSAIRE. Si la France ou l’Italie avait décidé de réquisitionner tout leur personnel médical et infirmier, le système de santé suisse se serait écroulé. Il faudra s’en rappeler lorsque la droite diabolisera à nouveau « les étrangers ». Surtout, il faut former davantage de personnel et créer des conditions de travail suffisamment satisfaisantes pour éviter que le personnel qualifié quitte ces professions au motif de surcharge et épuisement.

2. Le virus nous a enseigné que nettoyer, désinfecter, c’est aussi essentiel que soigner.

Combattre une pandémie nécessite la mise en place de règles d’hygiène strictes, sur tous nos lieux de vie : lieux de soins, espace public, écoles, structures d’accueil pour les enfants, ateliers, bureaux et administrations publiques. Ce personnel qui travaille dans les nettoyages, la logistique, les laboratoires, les cuisines, l’entretien de locaux est indispensable au fonctionnement des services publics, et pourtant pendant des années d’austérité budgétaire, il a été trop souvent externalisé. Conséquence : dégradation des salaires, des conditions de travail et de retraite.

→ PRIME DE RISQUE. Dans l’immédiat, ce personnel qui a aussi dû travailler pendant la pandémie et qui a pris des risques pour sa santé, doit également recevoir une prime ;

→ REINTERNALISER LES TACHES D’UTILITE PUBLIQUE. Il faut renverser la vapeur et réintégrer au sein du personnel de l’Etat et des institutions subventionnées, tous les personnels s’occupant de tâches d’utilité publique, à l’exemple du personnel de nettoyage ou des buanderies, qui sont d’ailleurs, en majorité des femmes, souvent migrantes ;

→ AMELIORER LES SALAIRES. Dans les services publics, lorsque ce personnel fait encore partie de la fonction publique, les conditions de travail et de salaires doivent être améliorées.

3. Le confinement a révélé que ralentir nos rythmes de vie est possible et nécessaire et il a mis en lumière l’importance du travail domestique, en particulier les tâches éducatives et de prise en charge des enfants et des ainé-e-s ».

Dès le moment où les plus de 65 ans n’ont plus eu le droit de voir leurs petits-enfants, le pays a découvert l’ampleur de la tâche de garde d’enfants qu’effectuent les grands-parents, les grands-mères en première ligne, ainsi que les lacunes du système collectif de garde extrafamilial. Découvert aussi que pour faire tourner l’économie à plein régime, il est indispensable d’ouvrir écoles et crèches pour libérer les parents, en première ligne les mères, de leurs tâches domestiques et de garde. Les parents se sont aussi rendu compte de l’importance de la qualité de l’accueil pré et parascolaire, ainsi que de l’école. Aussi, bon nombre de femmes, par manque de structure adaptées, ont dû gérer, en sus, la livraison des courses et des repas à leurs parents, lorsque ceux-ci n’étaient pas autonomes et sans place en EMS, car encore en liste d’attente.

→ REDUIRE LE TEMPS DE TRAVAIL. Nous devons relancer le débat sur la réduction du temps de travail. Selon l’OFS, le nombre d’heures travaillé en moyenne en Suisse est de 35 heures, si on inclut dans le calcul le temps partiel. En revanche, la durée légale du travail est une des plus longues des pays de l’OCDE ! Pour nous, un temps plein à 35 heures sans perte de salaire – et pourquoi pas à 32 heures comme le propose les jeunes pour le climat – est une revendication aussi réaliste que nécessaire. C’est le chemin à suivre pour sortir du piège du temps partiel qui nous emprisonne dans le cercle vicieux des bas salaires, de la précarité et des rentes de misère. Ralentir nos rythmes de vie est aussi une nécessité écologique ;

→ POUR UN SERVICE PUBLIC DE L’ENFANCE. Nous voulons un véritable service public de l’accueil des enfants pré et parascolaire, basé sur un principe d’accueil universel sans discrimination entre les enfants (parents qui sont actifs professionnellement ou pas, enfant à besoin spécifiques ou pas, enfants migrants ou pas, etc…), sur tout le territoire, gratuit pour les parents et financé, via l’impôt, sur le modèle de l’école publique ;

→ SOUTENIR LES PROCHES AIDANTS. Nous exigeons également un service de soutien aux parents et proches aidants et la reconnaissance de ce travail notamment dans les assurances sociales. Avec le Covid-19, il est également ressorti que non seulement les parents des élèves sans école, mais aussi les proches aidants ont été surchargés, notamment lorsque les personnes en situation de handicap ont été renvoyées à la maison.

4. La pandémie sert de prétexte au patronat et à la droite pour exiger un allongement et une flexibilisation de la durée du travail.

Pour faire face à la crise sanitaire, le Conseil fédéral a décrété pendant toute la durée de la pandémie et jusqu’au 1er juin 2020, la suspension de la Loi sur le travail (LTr) pour le personnel hospitalier, ce qui lui a valu la colère du personnel. Et pour cause : déjà avec la LTr le personnel hospitalier peut travailler jusqu’à 60 heures par semaine. Le personnel et le SSP ont dénoncé une politique qui ne fait qu’aggraver la situation en épuisant le personnel et amenant de nombreuses professionnel-le-s à quitter prématurément leur métier, en particulier à la naissance des enfants.

→ TRAVAILLER POUR VIVRE, PAS VIVRE POUR TRAVAILLER. Alors que le patronat revendique pour tous les secteurs et pour faire face à la crise, une extension et une flexibilisation encore accrue des horaires de travail, nous réclamons des horaires de travail compatibles avec nos vies familiales et privées ;

→ DES HORAIRES REGULIERS. Des horaires réguliers, couplés à une réduction du temps de travail, permettrait aux professionnel-le-s des secteurs de la santé en particulier, mais pas seulement, de rester en emploi plus longtemps et éviterait nombre de burnout. Globalement, toute la société dans son ensemble serait gagnante.

5. Le travail domestique soit l’ensemble des tâches effectuées en grande majorité par les femmes, permet la reproduction de la vie.

Loin d’être juste accessoire au travail productif, le travail domestique et de soins est central pour le fonctionnement de la société et de l’économie. Pourtant, il reste gratuit et non formateur de droit sociaux, hormis dans l’AVS, entraînant celles qui l’accomplissent dans une situation de précarité, notamment en cas de chômage ou lors de la retraite. Les femmes qui travaillent à temps partiel, n’ont droit qu’à un salaire partiel, alors qu’en cumulant emploi et travail domestique, elles accomplissent autant de travail que les hommes. Mais les deux tiers du travail des femmes, étant domestique, il est gratuit, alors que les deux tiers du travail accompli par les hommes est rémunéré. Conséquence : elles subissent de plein fouet toute baisse de revenu, notamment la baisse de 20% liée au chômage partiel pendant la pandémie.

→ ALLOCATION PERTE DE GAIN A 100%. Dans l’immédiat, nous revendiquons le versement du 100% du salaire pour tous les bas revenus pendant la période de la pandémie pour toutes les catégorie d’allocation ;

→ RECONNAITRE LE TRAVAIL DOMESTIQUE. Nous voulons la reconnaissance du temps de travail domestique dans les assurances sociales.

6. Le Covid-19 a mis en évidence que la santé se fragilise avec l’âge et que santé et inégalités sociales vont souvent de pair. Dans ce contexte, imposer une hausse de l’âge de la retraite est irresponsable et dangereux pour les personnes vulnérables.

Le virus ne frappe pas de la même manière les enfants, les jeunes, les adultes et les personnes âgées. Les personnes de 65 ans et plus ont été considérées comme vulnérables, en particulier celles et ceux ayant déjà des pathologies, comme l’hypertension, des maladies cardiovasculaires ou du diabète. Ce type de pathologie augmente fortement dès 50 ans. Sous pression des milieux économiques, le Conseil fédéral a pourtant affaibli la protection des personnes vulnérables et restreint leur nombre en introduisant des critères plus stricts. Or, face à la crise économique qui débute, le patronat a déjà avancé ses revendications, notamment une hausse généralisée de l’âge de la retraite à 67 ans ! C’est non seulement une mauvaise idée, mais c’est réellement une mise en danger de la vie des salarié-e-s, comme le montre cette pandémie qui ne disparaîtra pas en quelques jours. Nous combattrons – une fois de plus - tout projet d’augmentation de l’âge de la retraite de manière déterminée.

→ PROTEGER LES PERSONNES VULNERABLES. Alors que nous devons apprendre à vivre avec le Covid-19 pour une durée qui sera longue, nous exigeons la protection de toutes les personnes vulnérables, y compris les femmes enceintes ;

→ NON A LA HAUSSE DE L’ÂGE DE LA RETRAITE. Nous refusons toute hausse de l’âge de la retraite des femmes à 65 ans et nous revendiquons la retraite à 60 ans dans le secteur de la santé, ainsi que des horaires aménagés pour les personnes de plus de 55 ans.

7. Jamais autant de monde n’aura expérimenté le télétravail. Des aspects positifs ont souvent été mis en avant, notamment la réduction des déplacements bénéfiques en termes de climat et de temps, ou, parfois, une plus grande implication des pères confinés

Mais croire que le bureau à la maison permet de concilier famille et emploi, c’est faire fausse route.
Travailler en pyjama, en donnant un biberon à bébé, tout en suivant les cours à la maison de la grande est une mission impossible. Pendant le confinement et la fermeture des écoles, les parents, souvent les mères, ont cumulé télétravail et télé-école, préparation des repas, et autres tâche :, une double journée lourde de stress et de fatigue qui ne peut devenir la « norme ». Sans cadre légal, le télétravail dépasse rapidement les frontières de la vie privée, notamment pour les personnes à temps partiel, qui se retrouvent à être tout le temps branchées et disponibles.

→ REFUSER LA DOUBLE JOURNEE. Dans l’immédiat, le télétravail effectué pendant le confinement en même temps que la garde des enfants ne peut faire l’objet des mêmes exigences et évaluations que d’habitude, l’employeur doit prendre en compte la double tâche assumée par les parents ;

→ LE TELETRAVAIL N’EST PAS UN MODE DE GARDE. Lorsque la maison remplace le bureau, les familles ont autant besoin des structures d’accueil que lorsqu’on se rend au travail ;

→ IMPOSER UN CADRE ET DES LIMITES CLAIRS. Le télétravail doit bénéficier d’un cadre clair, afin de ne pas se retourner contre l’employé-e : nombre de spécialistes mettent en effet en garde contre les risques d’épuisement, d’isolement, de suppression de la frontière entre vie privée et vie professionnelle, ainsi qu’entre temps de travail et temps de repos.

8. Comme l’histoire le montre, dans chaque crise, le pouvoir patriarcal en profite pour imposer le statu quo, voire un retour en arrière aux femmes, considérant nos revendications comme un programme de beau temps.

Or, il n’en est rien. Nos revendications sont nécessaires et urgentes pour réaliser enfin une égalité dans les faits, pour reconnaître le travail de reproduction indispensable au fonctionnement de la société, pour mettre fin à toutes les discriminations et violences sexistes, exacerbées par la pandémie et pour construire un avenir féministe, solidaire et durable.

→ DU TEMPS POUR NOS VIES. Nous voulons que les collectivités publiques donnent l’exemple en adoptant un congé maternité de six mois, un congé paternité de deux mois et un congé parental payé à partager entre les deux parents, y compris pour les parents de même sexe et/ou adoptifs ;

→ PROTEGER LA SANTE PENDANT LA GROSSESSE ET L’ALLAITEMENT. Nous exigeons l’aménagement tant de l’espace que des horaires de travail pour les femmes enceintes et qui allaitent, ainsi que le remplacement systématique de toutes les femmes en congé maternité ;

→ L’EGALITE EST TOUJOURS D’ACTUALITE. Nous voulons un véritable plan pour l’égalité salariale, allant bien au-delà des exigences minimalistes des nouvelles dispositions de la Loi sur l’égalité qui entreront en vigueur le 1er juillet prochain ;

→ COMBATTRE TOUTES LES VIOLENCES SEXISTES. Le confinement n’a pas réduit les violences sexistes : selon des enquêtes menées à l’étranger, les violences ont même augmenté pendant la pandémie. Les services publics et subventionnés doivent mettre en œuvre des programmes de prévention et appliquer la tolérance zéro en matière de sexisme et de harcèlement sexuel. Crise ou pas, c’est une priorité.

→ LUTTER CONTRE LES PREJUGES SEXISTES. Nous demandons l’introduction du langage épicène, la mise en place de campagnes de sensibilisation au respect des femmes et des personnes LGBTIQ+ tant sur les lieux de travail qu’à l’école, ainsi que la prévention et la tolérance zéro en matière de sexisme et de harcèlement sexuel;

→ RESPECTER LE CORPS DES TRAVAILLEUSES. Nous voulons des habits de travail adaptés aux femmes dans les métiers masculins, des douches et vestiaires séparés, des mesures pour assurer la sécurité du personnel féminin sur certains lieux de travail sensibles, ainsi que sur le trajet, notamment pour les travailleuses de nuit.