AVS 21: une fracture de genre et de classe

En novembre, l’institut de sondage GFS Berne a publié son analyse Vox concernant les résultats de la votation sur AVS 21.

photo Eric Roset

Premier constat: l’analyse Vox confirme l’écart historique entre le vote des femmes et celui des hommes. Jamais elles et ils n’avaient voté de façon aussi opposée sur un objet fédéral. Si certaines personnes peuvent se sentir heurtées par une analyse en termes de « guerre des sexes », un fait demeure: 64% des hommes ont dit oui à AVS 21, contre à peine 38% des femmes. Une majorité de femmes - 74% des votantes en Suisse romande - ont voté non à l’élévation de leur âge de départ à la retraite dans tout le pays, y compris en Suisse alémanique, alors que les hommes ont été nombreux, y compris en Suisse romande, à voter oui – au mépris de l’avis de leurs compagnes.

Il s’agit donc, pour une partie de l’électorat du moins, d’un vote sanction, d’un vote machiste – et, surtout, d’un vote irréfléchi, car le oui à AVS 21 facilitera l’augmentation de l’âge de la retraite pour tout le monde ainsi que le démantèlement du 2e pilier dans le cadre de la contre-réforme LPP 21.

L’analyse Vox souligne aussi l’absence de solidarité des personnes retraitées envers les personnes actives. Les hommes de plus de 65 ans ont voté oui à 72%, tandis que les femmes de plus de 65 ans sont les seules à avoir accepté la réforme, à 58%. À contrario, les jeunes femmes de 18 à 39 ans ont refusé AVS 21 par 75% des voix – mais leur plus faible participation au scrutin n’a pas permis de faire la différence. En tout cas, la jeune génération a compris que l’égalité n’avance pas à reculons. C’est prometteur pour l’avenir des luttes féministes et syndicales.

L’analyse Vox confirme aussi un vote de classe: seules 32% des personnes gagnant moins de 3000 francs par mois ont voté oui, contre 60% des personnes qui gagnent plus de 11 000 francs. Malheureusement, mais dans la continuité des scrutins précédents, le taux de participation des classes populaires est inférieur à celui des classes privilégiées. À cela s’ajoute le fait qu’un quart des salarié·e·s, et notamment celles et ceux qui occupent des métiers pénibles, avec des contrats précaires et des bas salaires, n’ont pas pu voter car ils et elles ne disposent pas du passeport à croix blanche. Sur une votation à contenu éminemment social dont le résultat a été très serré, cette privation des droits civiques a certainement contribué à faire la différence.